Plongée au cœur du processus avec Nayla Chidiac
L'atelier d'écriture thérapeutique est un espace unique où les mots deviennent un moyen d'expression émotionnelle et de guérison psychologique. Mais comment se déroule concrètement une séance ? Selon Nayla Chidiac, qui anime cet atelier depuis sa création en 1998 à l'hôpital Sainte-Anne à Paris, « c’est un atelier en groupe avec des patients adultes, soit en traitement ambulatoire, soit hospitalisés ». Les séances se déroulent une fois par semaine et durent d'une heure et demie à deux heures. Elles sont structurées en trois temps principaux : l'accueil, le temps d'écriture et la lecture partagée, chacun ayant un rôle thérapeutique spécifique.
La séance commence par un temps d'accueil où les patients se retrouvent dans un espace fixe et sécurisé. Ce cadre bien défini est essentiel pour favoriser un sentiment de sécurité et de confiance. Nayla Chidiac souligne l'importance de cette structure en expliquant que « cet environnement bien codifié, bien défini, surdéterminé et présentant des contenants stricts est nécessaire pour que le patient se sente suffisamment rassuré et à l’aise ». Cette fixité du lieu et du temps permet aux participants de baisser leurs mécanismes de défense, condition préalable à toute exploration émotionnelle.
C'est également lors de ce premier temps que le thérapeute annonce la consigne d'écriture. Chaque semaine, une consigne différente est proposée, imposant à la fois un thème et une forme littéraire précise. La thématique abordée est choisie en fonction des objectifs thérapeutiques du groupe, tandis que la forme (poésie, récit, lettre, fable, etc.) est sélectionnée pour canaliser l'anxiété tout en stimulant l'imaginaire. Nayla Chidiac explique que « la contrainte littéraire est très strictement imposée par le thérapeute ». Cette structure offre un cadre protecteur qui permet de s'exprimer librement tout en se sentant en sécurité.
Après l'annonce de la consigne, le temps d'écriture commence. Cette phase dure généralement entre 30 et 45 minutes, en fonction de la difficulté de la consigne. Les participants écrivent en silence, chacun dans son espace personnel, tout en étant entourés du groupe. Cette présence collective crée un effet de soutien mutuel, favorisant l’expression émotionnelle dans un cadre sécurisé. Le thérapeute reste en retrait pendant cette phase, n'intervenant pas pour laisser le participant explorer son imaginaire de manière autonome. Selon Chidiac, « cette contrainte imposée par ces différents cadres permet d’abord au patient d’exprimer son anxiété, puis de la canaliser ».
La dernière partie de la séance est consacrée à la lecture des écrits par les participants. Chaque patient lit son texte à voix haute, s'il le souhaite, devant le groupe. Cette étape est cruciale car elle permet d'extérioriser des émotions souvent refoulées tout en favorisant l'élaboration symbolique. Nayla Chidiac souligne que « ce moment de lecture est associé à un temps de discussion ». Les réactions des autres participants créent un effet miroir qui aide à mieux comprendre ses propres émotions. En écoutant les écrits des autres, chacun découvre de nouvelles perspectives tout en se sentant moins seul face à ses souffrances.
Ce temps de partage favorise également un sentiment d'appartenance au groupe, essentiel pour les personnes souffrant d'isolement social ou de difficultés relationnelles. Le thérapeute intervient alors comme observateur, guidant les discussions pour éviter les jugements tout en favorisant l'écoute empathique. L'objectif n'est pas d'analyser le texte de manière psychanalytique mais de permettre à chacun de s'exprimer librement dans un espace de respect et de bienveillance.
Nayla Chidiac insiste sur l'importance de ce cadre de groupe en expliquant que « la dynamique de groupe va apporter l’évaluation d’une semaine à une autre de la nécessité des liens qui sont à maintenir et l’écoute des écrits des autres, ce qui va susciter la curiosité et favoriser la stimulation intellectuelle ». En écoutant les autres, le participant développe son empathie tout en enrichissant son imaginaire.
En conclusion, le déroulement d'une séance d'écriture thérapeutique, tel que décrit par Nayla Chidiac, est un processus structuré en trois temps qui permet une exploration émotionnelle progressive. L'accueil crée un espace sécurisé, le temps d'écriture favorise l'expression personnelle, et la lecture partagée renforce les liens sociaux tout en offrant un effet cathartique. Grâce à ce cadre bien défini, l'atelier permet aux participants de canaliser leurs émotions, de symboliser leurs expériences et de reconstruire leur estime de soi. Comme le résume Chidiac, « l’écriture permet d’accéder à d’autres champs de connaissance et à d’autres facettes de soi-même ».